L' “Humain”

L’humain est devenu l’animal le plus redoutable de la planète. Le plus fort de tous. Le roi des animaux.

Et l’habit d’animal est devenu trop petit pour lui. D’ailleurs, le qualificatif « animal » est, pour la majorité de ces humains, un repoussoir, un scandale, ou une provocation. Ou alors, si on désigne un être humain par le nom d’un animal, c’est en général pour le dénigrer.

L’humain a su compenser certaines faiblesses physiques par rapport à d’autres espèces animales, par une ingéniosité et une organisation qui lui ont permis de piéger, de se protéger et d’étendre son territoire…

Il a maîtrisé le feu, il a surtout commencé, à un certain moment déterminant de « son histoire », à parler, à compter et à écrire.

Et cela, grâce à un cerveau aux capacités devenues incomparables.


Le lion est le roi de la jungle depuis près de 4 millions d’années, et la jungle est restée la jungle. Certes, elle est moins étendue aujourd’hui qu’elle ne l’était à l’époque. Mais rien n’a vraiment bougé.

Le lion n’est « pas si fort que ça » en fait.

L’humain, lui, a tout changé en 6 000 ans.

Champion du monde ! Et encore, « le monde » n’est « pas assez fort » pour qualifier sa prouesse. Il y a les Miss et Mister Univers, alors pourquoi pas « Race Univers » ?

Sur la planète qui l’a accueilli :

Des millions d’hectares de forêts et de prairies, des territoires complets ont été défrichés, irrigués et cultivés.

Des cours d’eau ont été détournés, des puits creusés, des marais asséchés, des canaux créés, des barrages érigés.

Des chemins, des routes, des autoroutes, des voies de chemin de fer ont été aménagés, des ponts construits, des tunnels excavés…

Des milliards de voitures les empruntent quotidiennement et des milliers d’avions sillonnent le ciel.

Des animaux ont été domestiqués afin de l’aider à chasser d’abord, puis à lui tenir compagnie ; d’autres par milliard sont élevés dans des champs, ou, souvent, « en batterie » à l’ombre de grands halls, avant d’être abattus pour leur viande, sans que ceux et celles qui la consomment aient conscience de là où ils ont vécu et dans quelles conditions.

Des hameaux par millions, des villages, des villes et maintenant des mégapoles ont été créés pour abriter et protéger ces individus qui vivent aujourd’hui dans des appartements, des maisons individuelles et dans des tours, qui atteignent parfois plusieurs centaines de mètres de hauteur.

De milliers de mines, de carrières, de puits, sur terre et sur mer sont extraits chaque année, des milliards et des milliards de tonnes de roches, de minéraux et de pétrole.

Des usines produisent toutes sortent de matériels, d’aliments et d’objets tels que des vases, des appareils électroménagers, des téléphones mobiles, ou des plats préparés.

Tout cela a été réalisé en 6 000 ans, avec une accélération vertigineuse sur les deux derniers siècles. En langage humain, on appelle cela « le progrès ».  

D’autres signes du progrès ?

L’humain peut - quand il en a les moyens - voyager d’un point à un autre de la planète en moins d’un jour. Sa « longévité » a augmenté dans de grandes proportions. Il peut accéder, lorsque la censure ne s’exerce pas, à un nombre infini d’informations et les partager avec n’importe quel autre être humain de la planète.

Il a posé le pied sur la lune et y a laissé des traces de son passage : des drapeaux, des balles de golf, une statuette, sans doute afin de marquer son territoire. C’est sans compter sur les tonnes de matériels qu’il ne peut pour l’instant malheureusement pas ramener.

Malgré toutes ces prouesses (en tout cas c’est ainsi que les humains considèrent ces réalisations), et peut-être à cause de certaines d’entre-elles, voilà pourtant où on en est : de plus en plus d’hommes et de femmes se posent des questions quant à leur survie.

La plupart des humains souffrent, et, malgré les apparences, malgré l’abondance, ils vivent dans la peur.


L’humain n’est pas, « par nature », violent, possessif, envieux, honteux, arrogant, dépressif, ou anxieux

Il l’est devenu.

Il y a d’abord eu sans doute, il y a très longtemps, la prise de conscience qu’il mourrait. Il est alors « rentré dans le temps ». D’où certainement, une nouvelle forme de peur « existentielle » qui a sans doute constitué le fondement de l’égo.

Mais cela ne l’empêchait pas de vivre le plus souvent en paix, « ne travaillant (c’est à dire chassant, cueillant ou migrant) que quelques heures par jour. Cela suffisait à son bonheur.

Et puis est arrivée l’invention qui allait tout bouleverser : la culture des plantes et des céréales et l’élevage d’animaux. Des humains ont commencé à se sédentariser, à penser et à dire : « c’est ma forêt, c’est mon territoire ».

Et tout a dû s’accélérer peu de temps après suite, peut-être à certains changements climatiques. Ces chers « Indo-européens », nos aïeux que nous vénérons tant, ont commencé à agresser et soumettre d’autres peuples. Les progrès techniques leur avaient permis de disposer d’armes tranchantes qui tuent bien plus rapidement et facilement qu’un gourdin ou des mains nues.

Ils l’ont fait, parce qu’ils étaient trop nombreux et qu’ils ne pouvaient plus survivre là où ils habitaient.

Ils l’ont fait de plus en plus et avec de plus en plus de violence, parce qu’ils ont pris goût au fait de posséder et sont devenus dépendants au besoin de contrôler. Ils ont commencé à « s’identifier à « celui qui possède et qui contrôle ». Ils ont mis en place des organisations sociales et militaires hiérarchisées, ils ont imposé des modèles familiaux patriarcaux.

En même temps qu’ils ont basculé du côté « obscur » (ce qui est pourtant plus ou moins glorifié dans nos livres d’histoire), ils se sont détachés de la nature. Ils ont commencé à mépriser et maltraiter les animaux, à vouloir « éduquer » les enfants pour qu’ils soient obéissants, et les femmes sont devenues des objets. L’esclavage a été « inventé ». Et on trouvait toujours une bonne raison pour qu’il en soit ainsi.

On a remplacé la « Déesse-Mère » que les humains vénéraient jusqu’alors, par des dieux masculins et guerriers.

Aux quatre coins du monde, en l’espace d’un millénaire, des civilisations se sont imposées en même temps que l’égo « explosait ».


Oui, l’humain n’a pas toujours été comme il est raconté dans les livres d’histoire.

Ce n’est pas « dans sa nature » de souffrir, de faire souffrir, d’être violent pour d’autres raisons que celles de se nourrir ou de se protéger.

Tout cela n’est pas naturel. Ce n’est pas « normal ». C’est surtout inutile.

C’est une perversion qui a créé « la souffrance de l’homme ».

Cette perversion n’est pas à chercher « chez un peuple » en particulier.

Elle s’est installée profondément quand on a commencé à croire que l’intelligence et la technique devaient « nous » sauver de la nature et des « autres ». L’humain s’est ainsi par la même occasion, coupé de la nature et donc de la sienne.

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